Divorce avec Nissan, rapprochement avec Geely: quel avenir pour Renault?
L’Alliance avec Nissan et Mitsubishi est bien morte
Annoncée en début de semaine, la fin de l’Alliance a fait entrer Renault dans une nouvelle étape de son existence. Une étape que l’on pensait inimaginable il y a encore quelques années. A l’époque, alors que les synergies se multipliaient, le gouvernement français voulait conclure avec les alliés nippons une fusion afin que les deux soient indissociables. On connaît la suite... Les japonais ont fait tomber l’homme qui était à la baguette, et les français très courageux ont tenté de sauver ce qui était sauvable, en accablant l’homme qui avait cette mission, en l'occurrence Carlos Ghosn.
Pendant deux décennies, beaucoup ont vanté le fonctionnement de l’Alliance. Bien qu’imparfaite, elle permettait aux deux constructeurs de faire des milliards d’économies. Dès lors, on pourrait se demander, comment en s’en passant, les deux anciens alliés pourraient survivre… Désormais, les deux marques disposeront de leurs propres plates-formes, mais pourront collaborer au cas par cas. On pense notamment au rebadgage de certains modèles Renault chez Mitsubishi comme le futur Scénic. Des modèles qui sont d'ailleurs vendus plus chers que les originaux...
Un objectif: trouver de nouveaux investisseurs en plus de Geely et Volvo
Pour Renault, la stratégie est claire: il faut faire entrer de l’argent. Pour cela, la marque se retrouve éclatée en 4 entités distinctes en faisant entrer de nouveaux investisseurs, la marque Renault n’étant pratiquement plus que la partie commerciale. Et surtout, ces entités pourront produire des modèles pour les concurrents. C'est ainsi que la Polestar sera produite par Renault, une bonne nouvelle donc. Sauf qu'elle sera produite... en Corée.
L'ingénierie devient Ampère pour la partie électrique, et Horse pour la partie thermique, tandis que les différentes usines seront transférées à ces nouvelles entités qui n’appartiendront plus totalement à Renault. Car oui, l’objectif de cette stratégie est bien de récolter des fonds, quitte à se défaire partiellement des bijoux de famille.
Luca de Meo fonde de gros espoirs sur Ampere. Il fait feu de tout bois pour tenter de convaincre des investisseurs, et ainsi de rattraper Tesla. Même si le constructeur veut rester majoritaire, il lui faut des investisseurs. Même si l’Alliance n’est plus, Nissan s’est engagé à investir 600 millions d’euros, MMC (dont Nissan est actionnaire à hauteur de 34%) apportera 200 millions. Le géant Qualcomm devrait aussi participer à l’opération. Luca de Meo veut qu’Ampere soit valorisée entre 8 et 9 milliards d’euros. Mais pour l‘instant, on en est loin. Selon les spécialistes la valorisation pourrait être inférieure à 5 millions, soit moitié moins. Ampère deviendra ainsi le constructeur de la future R5 électrique, et Renault son client ainsi que le revendeur.
Pour la partie thermique et hybride, l’entité Power/Horse sera principalement partagée entre le chinois Geely et Renault ainsi que le pétrolier saoudien Aramco. Là aussi, Renault va transférer à sa filiale ses usines et ses différents pôles de compétence. Mais contrairement à Ampere, Renault n’aura plus la majorité des parts.
Il ne sera donc plus le seul décisionnaire. Pourtant, si en Europe l’électrique représente en théorie l’avenir, dans le reste du monde, c’est moins évident. En “offrant” ainsi ces activités aux chinois et saoudiens, le constructeur dont l’actionnaire majoritaire est l’Etat Français, n’est-il pas en train de se vendre au plus offrant ?
Renault a d’ailleurs déjà cédé 34% de Renault Korean Motors (ex Renault Samsung Motors) au même Geely et a annoncé que les futures plates-formes prévues pour l’Asie seront conçues avec le groupe du milliardaire Li Shufu, qui a déjà racheté Volvo Cars il y a quelques années, qui est monté dernièrement au capital d’Aston Martin, et qui est également le premier actionnaire de l’allemand Daimler. Un nouveau 4x4 d'origine chinoise est d'ailleurs attendu en Corée au cours du premier semestre 2024.
Autre partenariat, mais qui fait moins peur, celui avec Volvo Trucks (qui a racheté il y a quelques années la division Renault Trucks) pour la création d’un nouveau petit utilitaire électrique qui viendra s'ajouter au futur Master en 2024, au Kangoo E-TECH ainsi qu'au nouveau Trafic E-TECH fraîchement commercialisé. Les deux constructeurs sont très liés depuis de nombreuses années, puisque le Master Propulsion est notamment vendu par Renault Trucks bien que les deux marques n’aient plus rien à voir si ce n’est un logo qui était encore commun jusqu’au nouveau blason.
Si chez Renault l’optimisme règne, forcément, du côté des syndicats, on fait grise mine avec cette impression de démantèlement du groupe. Seul l’avenir nous dira si Luca de Meo a eu raison. Mais espérons le pour cette marque qui a jusque là traversé tous les remous de l’histoire.
L'immobilisme de Mobilize ?
Aux côtés d'Ampere dont on parle beaucoup et de Power, une autre filiale est également active: Mobilize. L'entité dédiée aux solutions de mobilités électriques et partagées et au financement a repris les actifs de la DIAC (Mobilize Financial Service). Sur la partie financement, hormis le changement de nom, rien de bien neuf.
Mais Mobilize avait surtout pour ambition de proposer des services de location de voitures aux taxis ou de l'autopartage. Renault comptait en effet importer de Chine l'électrique Limo et la proposer en location. L'offre, peu connue, n'a semble t-il pas fait lever les foules. Mobilize a ainsi retirée sa Limo qui ne viendra ainsi probablement jamais en Europe.
En revanche, la petite voiture sans permis Duo et la version utilitaire Bento seront proposées en France en autopartage d'ici le printemps 2024. Une offre que proposait déjà Renault via AUTOPARTAGE RENAULT MOBILITY ou encore Zity.
Mobilize propose également des solutions de recharge (Mobilize Charge Pass) permettant d'accéder à plus de 500 000 bornes dans 25 pays d'Europe, ou encore l'installation de bornes à domicile.