Volvo et Renault sur le point de divorcer 3 ans après leur mariage ?
Ce projet, qui devait révolutionner le marché des utilitaires en Europe, s’appuyait sur une architecture innovante de type « Software Defined Vehicle » (SDV), promettant des véhicules ultra-connectés, modulables et adaptés aux besoins de la logistique urbaine et des problématiques de place et des stationnements dans les grandes villes. Le groupe CMA CGM, spécialiste du transport maritime, s’était également joint à l’aventure, apportant son expertise logistique et un investissement de 120 millions d’euros. Les premiers modèles devaient sortir des usines Renault de Sandouville dès 2026, avec pour objectif de répondre à un marché européen des fourgons électrifiés en pleine expansion, attendu pour tripler d’ici 2030.
Des désaccords stratégiques et commerciaux
Cependant, des tensions majeures sont apparues entre les deux partenaires. Renault, confronté à un marché des utilitaires électriques moins dynamique que prévu, aurait proposé de réduire la voilure du projet, c’est-à-dire de limiter le nombre de modèles ou les volumes de production. Volvo Trucks, de son côté, aurait refusé cette réduction, insistant pour maintenir les ambitions initiales. Ces divergences menacent désormais l’avenir de la coentreprise Flexis, alors que les premiers véhicules devaient être lancés dans quelques mois avec notamment le nouveau Trafic électrique.
Le nouveau Trafic doit sortir l'année prochaine
Les raisons de ces tensions sont multiples. Renault, qui a déjà connu des difficultés avec la liquidation judiciaire de sa filiale Hyvia (spécialisée dans les utilitaires à hydrogène) en début d’année 2025, cherche à adapter sa stratégie à la réalité du marché. Le constructeur français qui a vu le secteur des utilitaires dégringoler malgré l'arrivée du nouveau Master 4, souhaite éviter de surinvestir dans un segment du VU tout électrique où la demande est encore plus incertaine, malgré les prévisions optimistes. Volvo Trucks, en revanche, semble déterminé à maintenir le cap, probablement pour conserver une position forte face à la concurrence, notamment Stellantis, Ford et Kia qui investissent massivement dans les utilitaires électriques.
Un contexte économique et industriel tendu
Le partenariat entre Renault et Volvo Trucks s’inscrivait dans une logique de mutualisation des coûts de développement et de production, afin de rendre les utilitaires électriques plus compétitifs. La plateforme SDV devait permettre une grande flexibilité, avec des véhicules modulables selon les besoins des clients (livraison urbaine, dernier kilomètre, etc.). L’usine Renault de Sandouville, en Normandie, était désignée pour produire ces nouveaux modèles, ce qui devait assurer son avenir industriel.
Cependant, les désaccords actuels soulignent les défis auxquels font face les constructeurs européens : un marché en mutation, une concurrence accrue (particulièrement chinoise), et des coûts de développement élevés pour des technologies encore émergentes. Renault, qui a également noué un partenariat avec Ford hier pour développer des véhicules électriques en France basés sur la nouvelle R5, leader des voitures électriques en Europe, qui a passé le cap des 100 000 unités produites, semble privilégier une approche plus prudente, en adaptant ses investissements à la demande réelle. Et l'annonce d'hier parait indiquer que Renault pourrait bien rapidement remplacer Volvo par Ford. En attendant, le tribunal des activités économiques de Nanterre a nommé un conciliateur pour tenter de trouver une solution.
Les enjeux pour l’avenir
La crise entre Renault et Volvo Trucks intervient à un moment charnière pour l’industrie automobile européenne. Les deux groupes doivent trouver un compromis pour éviter l’échec de Flexis, qui représenterait un coup dur pour leurs ambitions dans l’électrification des utilitaires. Les négociations en cours sont houleuses, mais une issue reste possible, notamment en raison de l’avancement des projets et des investissements déjà réalisés.